n°1 — Des hommes et des puces neurales
Bienvenue dans ce premier numéro de Futuromium+
EN RÉSUMÉ
Les humains qui contrôlent des machines avec leur esprit semblent sortir tout droit d'un roman ou d'un film de science-fiction, mais cela devient une réalité grâce aux interfaces cerveau-ordinateur. Comprendre aujourd'hui cette technologie, nous permettra à termes de prendre les bonnes décisions, avant qu'elle ne devienne partie intégrante de notre quotidien.
Trois drones s'envolent, remplissant l'air de leur bourdonnement. Ils s'élèvent lentement, puis se mettent en vol stationnaire.
Au sol, le pilote ne tient pas de télécommande. En fait, il ne tient rien du tout. Il est juste assis là, calmement, contrôlant les drones avec son esprit.
Ce n'est pas de la science-fiction. C'est une vidéo YouTube qui date de 2016.
Dans la vidéo, un doctorant en génie mécanique de l'Université d'État de l'Arizona (ASU) porte un étrange couvre-chef. Il ressemble un peu à un bonnet de bain, mais avec près de 130 capteurs colorés qui détectent les ondes cérébrales de l'étudiant. Ces dispositifs lui permettent de déplacer les drones en pensant simplement à des commandes directionnelles : haut, bas, gauche, droite.
Aujourd'hui, ce type de technologie d'interface cerveau-ordinateur (BCI) est toujours en cours de développement dans des laboratoires comme celui de l'ASU en 2016, qui a depuis déménagé à l'université du Delaware. À l'avenir, toutes sortes de technologies à interface neuronale directe pourraient nous être vendues ou déployées sur le champ de bataille.
Cette flotte de drones contrôlée par l'esprit n'est qu'un des exemples sur lequel se penchent les scientifiques. Au regard des dernières avancées, cette technologie semble prometteuse. En effet, le dernier rapport de Neuralink, la start-up d'Elon Musk, en 2019, a montré des résultats significatifs, en améliorant la motricité des personnes handicapées. Et même si les essais cliniques ont pour l'instant porté sur des rats, les conclusions sont suffisamment encourageantes. Ces percées sont vraiment capitales et il faut donc réfléchir sérieusement à leurs impacts sur notre quotidien.
Qu'est-ce-qu'une Interface Neuronale Directe ou une Interface Cerveau-Machine ?
La technologie ICM permet à un cerveau humain et à un appareil externe de se parler pour échanger des signaux. Elle donne aux humains la capacité de contrôler directement des machines, sans les contraintes physiques du corps.
Aujourd'hui, il existe des ICM qui varient en termes de précision et d'invasivité, deux qualités essentielles à cette technologie. Plus la proximité avec l'électrode est grande, meilleur est le signal avec le cerveau. Les outils non invasifs utilisent souvent des capteurs appliqués sur ou près de la tête pour suivre et enregistrer l'activité cérébrale, tout comme le bonnet de bain utilisé par l'étudiant de l'ASU. Ces outils peuvent être placés et retirés facilement, mais leurs signaux peuvent être étouffés et imprécis.
Une ICM invasive nécessiterait, quant à elle, une intervention chirurgicale. Des dispositifs électroniques devraient être implantés sous le crâne, directement dans le cerveau, pour cibler des ensembles spécifiques de neurones. Les implants ICM, actuellement en cours de développement, sont minuscules et peuvent engager jusqu'à un million de neurones à la fois. Par exemple, une équipe de recherche de l'université de Californie, Berkeley, a créé des capteurs qui ont à peu près la taille d'un grain de sable. Ils appellent ces capteurs "poussière neurale".
Quels seront les secteurs pionniers ?
Les inévitables problèmes éthiques que l'interface cerveau-machine comporte
Si les interfaces cerveau-machine font fantasmer tous les transhumanistes de la planète, elles posent tout de même quelques problèmes éthiques. En voici quelques unes, la liste est non-exhaustive.
1) Mon corps, mon moi.
S'implanter une puce neurale augmenterait certaines de nos capacités physiques. Il est probable qu'à termes, notre physique puisse changer. Mais est-il possible qu'elle alterne notre personnalité ? A l'instar des Borgs dans Star Trek...
2) Je ne vous fais pas suffisamment confiance
Il faudra être rigoureux, transparent et sérieux lorsque les techs communiqueront sur le sujet. La moindre erreur de communication et la population pourrait très bien perdre rapidement confiance, alimentant au passage les rumeurs complotistes.
3) Sortez de ma tête
S'implanter une puce neurale ne garantit en rien que votre vie privée et vos données personnelles soient protégées. Bien au contraire.
4) Le droit à la déconnexion
Aujourd'hui, on peut se déconnecter facilement d'Internet et de tout autre objet connecté. Pourra-t-on le faire avec une puce neurale implantée ?
5) Fracture numérique...
L'accès à cette technologie sera réservé à une élite, enthousiaste à l'idée de devenir sur-humain.
6) et fracture sociale,
Les données individuelles générées par l'implantation de cette technologie ouvriront la voie à de possibles discriminations et problèmes juridiques de taille.